Ecodev Conseil
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93170  Bagnolet

14/12/2015

La COP 21 : Retour sur Génération Climat et la Galerie des Solutions

La COP 21 : cette 21ème Conférence sur le Climat était largement ouverte à la « société civile », à travers tout d’abord GENERATION CLIMAT, pavillon d’exposition et de débats, aisément accessible sans formalité particulière (juste l’indispensable contrôle de sécurité de type aéroportuaire), et puis grâce à la « Galerie des Solutions » : un badge assez facile à obtenir sur le site de la COP21 (NB : j’ai eu le mien très vite grâce au CD de la Seine Saint-Denis, que je ne saurais trop remercier).

Cela étant, impression générale que peu de citoyens franciliens aient réellement profité de cette proximité. J’ai rencontré un groupe de jeunes filles venues de Montfermeil à pied (en 4 heures, bravo !) et quelques étudiants, de rares familles (le samedi) ; et c’est bien dommage car il y avait là une occasion exceptionnelle de participer à des débats, conférences, de rencontrer des délégués du monde entier et cela en toute simplicité. C’était sans doute une première pour une COP que d’être aussi ouverte. Même s’il était quasi impossible (sauf pour la presse et les personnes accréditées par l’ONU) d’accéder aux salles de négociations. D’autant qu’un bon nombre de négociateurs, facilitateurs, représentants d’ONG en sont sortis pour venir s’exprimer dans les différents forums et salles de conférences.

J’ai pu participer à plusieurs journées et événements en marge des négociations, au titre d’ECODEV CONSEIL (« éco-acteur francilien ») et comme simple citoyen concerné par les menaces et risques qui pèsent sur le devenir de notre planète. Heureux aussi d’entendre d’autres discours dans cette période électorale.

Flashs sur les évènements et conférences  GENERATION CLIMAT:

1/ Sommet mondial climat et territoires : la contribution des organisations non étatiques - ONG et villes (organisé par la région Rhône-Alpes après la précédente réunion à Lyon).

S’y succèdent un très grand nombre d’interventions, autant d’éloquents plaidoyers :

Le Vice-Président de la Région Rhône Alpes souligne l’importance de la mobilisation des acteurs territoriaux dans cette conférence et la nécessité de leur pleine reconnaissance. Tous s’accordent pour affirmer que les territoires, les villes, régions et agglomérations ont un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre la progression du niveau de CO² et autres émissions à l’échelle planétaire et du réchauffement qui en découle, par leurs décisions, leurs politiques d’infrastructures, leurs choix énergétiques, de mobilité et que cette importance doit être affirmée.

Roland Gérard (Vice -Président du réseau Ecole et Nature) insiste sur la nécessité d’introduire dans la résolution finale la dimension d’éducation à l’environnement (relation à la nature) et de la préparation d’une « coconstruction citoyenne » qui se concrétise par des espaces « départementaux » de concertation et s’articule avec le développement d’un réseau européen.

Intervention très remarquée de Jorge Furagaro, représentant de l’Amazonie péruvienne. « Nuestro Hogar », notre foyer qu’il nous faut défendre, non pas tant comme zone « protégée » mais comme entité vécue, authentique et assumée dans ses choix de vie et de culture et reconnue dans ses combats et dans ses droits. Un indien d’Amazonie brésilienne tiendra des propos similaires dans une mini conférence toute proche.

Energy cities cleaner : pour une production énergétique décentralisée ; vers des territoires « décarbonés », visant un objectif à relativement court terme de 40% de réduction des émissions de CO2 grâce à l’engagement fort des villes.

Le syndicat CFDT expose ses vues sur l’emploi dans une économie bas carbone … C’est un paradigme économique à changer, un levier de croissance ; exemple : la DCN (Direction de la Construction Navale) de Brest s’investit dans la réalisation d’hydroliennes offshore.

Carlés Llorens (ORU / Catalogne) défend un modèle « inclusif » pour l’agriculture et des territoires ruraux équilibrés.

Astrid Frey prône la généralisation des plans climat énergie (PCET) à l’échelle internationale.

La CGLU (Cités et gouvernements locaux unis) travaille sur de nouveaux mécanismes financiers locaux à créer. Green Cross : justice climatique, éthique et développement durable, les 4 D (décarboner, déconnecter, découpler, déployer…). Mobilité urbaine, planification territoriale dans une approche globale et systémique, tous thèmes largement mis en avant. Mobilisons nos villes ! Voici les 100 villes engagées (avec le CEREMA, l’ADME, l’AFD), et sont sur les rangs Tunis, Dakar, Rio de Janeiro, Recife, Capetown et bien d’autres…

Pour clore cette session de près de deux heures, David Heurtel, ministre de l’environnement du Québec rappelle le rôle clé des états fédérés qui s’engagent de plus en plus dans la réduction carbone de leurs économies. Le Québec fait d’ailleurs alliance avec la Californie et l’Etat de Washington, c’est une nouvelle géographie qui se dessine.

Adoption (à mains levées) de la déclaration, qui met la barre à un réchauffement de 1,5° maximum.

Et attend un accord universel, solide, contraignant et équitable (c’était 10 jours avant la fin de la COP).

Prochaine étape : Nantes en septembre 2016.

 

2/ Propositions des jeunes étudiants pour les villes durables (smart cities)

A l’initiative du Swedish Institute, plusieurs grandes écoles et universités (dont Sciences po, l’Ecole nationale des ponts et chaussées, Arts et Métiers Paris Tech ) ont lancé un programme international d’appel à idées et à projets et de partage d’idées en open source à l’échelle mondiale et organisé une sélection de sites d’expérimentation en vraie grandeur (smart living cities showcases). Une « short list » est présentée ici et soumise au vote des participants. Résultat : le projet du Rio Grande do Sul (Brésil) est retenu. Tous invités à contribuer.

La démarche est intéressante et brillamment exposée, soutenue par un vibrant appel à la capacité d’innovation de la jeunesse. A suivre pour mieux connaitre leurs propositions …

3/ Des événements et ateliers tous les jours !

-Balade en bateau (le catamaran solaire), à l’initiative de l’ARENE ile de France. Départ Quai de Loire, lente navigation jusqu’à la passerelle de Bobigny ; ciel bleu, vision depuis la voie d’eau d’un territoire anciennement industriel, en mutation, en reconquête très progressive, avec des projets urbains ambitieux dans une approche d’écoquartier à grande échelle (pour simplifier). Nouveaux usages mixant loisirs nautiques et navigation commerciale (capacité de 50 péniches de gabarit réduit par jour, contre une petite dizaine actuellement).

-Atelier participatif économie circulaire et économie sociale et solidaire, sur le stand de la région Ile de France ; on mélange un peu tout dans une version ludique et animée, c’est samedi …

- Rencontre avec Camila Amaya Castro (association BLU) sur les innovations (souvent très créatives) en économie circulaire présentées – comme le papier pierre, fabriqué sans eau ni cellulose, à base de poudre minérale à 80% et de polyéthylène à2 0% (avec les sous-produits de l’exploitation de carrières ou de chantiers de déconstruction).

- Démonstration de l’Eco-cleaner (Get Innovation International, siège à Noisy le Grand 93) : professionnels de la restauration, détruisez vos déchets alimentaires dans un espace réduit, sans eau, sans rejet ; le séchat sera valorisé en amendement organique.

- Démonstration « chantier 0 carbone » (sur le stand de la Seine Saint-Denis), par la PME ENVIRO PLUS de Dormans dans la Marne, qui a innové dans le cadre du chantier Zéro carbone du Bourget avec son système en circuit fermé des rouleaux de peinture, grâce à des agrosolvants.

- Sécurité alimentaire dans la Corne de l’Afrique et facteur démographique (peu pris en compte).

- Pétition sur la protection des océans et leur intégration dans le texte de la COP 21 (je signe) ;

- Concours organisé par la Ligue de protection des oiseaux, qui lutte contre la destruction des habitats et l’extinction accélérée d’espèces.

4/ Conférence organisée par SUSTAINIA 100 : les 100 initiatives « low carbon » des villes retenues à l’échelle mondiale

Impossible de tout citer ; du plastique négatif en carbone, à la réutilisation des filtres usagés des systèmes de climatisation, du solar power and repair service (pour les zones semi-désertiques d’Afrique), aux chargeurs solaires tous usages, accès partagés à des réseaux d’imprimantes 3D (un marché immense), utilisation de green bonds pour micro-projets, bus électriques ultra rapides (à Nanjing, China), vélos solaires, réseau des circulations douces totalement revues et décuplées à Chennai Inde, l’ancienne Madras, ville où le niveau d’accidentologie est particulièrement élevé et frappe les plus pauvres (initiative lauréate cette année), etc. …

Condition : des business modèles capables de développer des économies d’échelle et d’élargir rapidement le marché (scaling). Bravo, ça marche !

Et sur les stands à nouveau : démonstration de la « route solaire » (collaboration l’Institut National de l’énergie solaire et le Groupe Colas), avec un revêtement en couche mince de capteurs photovoltaïques, un ruban très résistant au passage des véhicules, qui peut se déployer sur des kilomètres, sans consommer d’espace.

Pendant la COP 21 : déploiement d’un réseau d’alerte (niveaux de CO²) par une nouvelle génération de capteurs disposés sur les immeubles les plus élevés et bien sûr la Tour Eiffel.

La Galerie des solutions

1°/ Les politiques de l’énergie et le devenir du nucléaire

C’est un autre volet, plus étonnant dans ce contexte : l’avenir du nucléaire, peu émetteur de C0², quelles nouvelles technologies, quelles nouvelles perspectives ?

Interventions de l’American nuclear society (relayée par les déclarations du secrétaire d’Etat américain à l’Energie), qui souligne que le nucléaire doit rester, s’adapter (adaptative technologies), comme facteur stabilisant de la production mondiale d’énergie, écrêtant en quelque sorte les aléas et variations des sources d’énergies renouvelables comme le solaire et l’éolien face à une demande énergétique qui poursuit sa croissance à l’échelle mondiale. Un effort important de R&D sur les solutions de type fusion (et non fission), sur des solutions technologiques de type Nuscale power (graphite pebbles) ou HTGR (refroidissement avec l’Hélium), utilisé en Allemagne et en Chine. ARC 100 reactors (facilement industrialisable, très sûr, fonctionne avec le recyclage des déchets nucléaires des centrales de transition en cycle autonome de 20 ans). A regarder de plus près.

John Holden, conseiller scientifique de la Maison Blanche, le rappelle, tout en insistant sur tous les autres axes d’effort : les énergies renouvelables (qui devraient atteindre aux Etats Unis 40% en 2030 et beaucoup plus dans certains états comme le Vermont ou Washnigton), la capture et le stockage de C0², l’intérêt des solutions gaz (moindre mal au regard des solutions charbon et pétrole auxquels il est encore fait largement recours, en Chine, en Afrique du sud et aux USA). La France reste un cas exceptionnel avec ses 80% d’électricité d’origine nucléaire (contre 20% actuellement aux Etats-Unis et le thermique, 67% !).

2°/ Le monde de la finance peut-il contribuer à décarboner l’économie ?

Question audacieuse s’il en est ! Une table ronde assez exceptionnelle réunit de façon très détendue, le directeur de la Banque mondiale, une représentation de la célèbre agence de notation Standard and Poors, MIROVA, filiale d’expertise de l’investissement responsable de NATIXIS, le directeur général d’EURONEXT (bourses de Paris, Bruxelles et Amsterdam) et un représentant de la City londonienne.

Point de départ, le rapport Grandjean (feuille de route pour financer l’économie décarbonée) exposé par deux experts qui y ont contribué. Rapport qui conduit notamment au partenariat Caisse des Dépôts et AFD (Agence Française de développement), pour libérer sa capacité d’intervention pour des opérations bas carbone entre autres points et préconise un « corridor de convergence des prix carbone ».

Le fonds vert pour le climat (GCF) avec ses 100 milliards $ de contributions diverses, publiques, privées, en nature (à supposer que cet objectif soit atteint) suffira-t-il ? Probablement pas, car la transition énergétiques supposerait des trillions (milliers de milliards) !

En second lieu, le prix du carbone et le marché des quotas ne sont pas à l’ordre du jour (pas dans le mandat de la COP 21 !). 40 pays ont déjà fixé des prix du CO², mais absence de convergence ; idéalement, il faudrait passer de 20 – 25 € la tonne en 2020 à 50 – 60 vers 2030 … Les économistes peinent à s’accorder sur un prix de référence, car c’est une arme à double tranchant.

La Banque Mondiale, en la personne de Bertrand Badré, (70 milliards d’engagements) avance que 20% de ses interventions ont déjà un objectif climat avec un net effet de levier et qu’elle souhaite passer à 28% et soutient l’intérêt du prix du CO².

MIROVA explique ses nouvelles méthodes d’analyse des projets (rapport entre carbone utilisé et carbone évité).

Deux questions : les green bonds sont-ils vraiment verts ? - Oui. Quelle perception du mouvement DIVEST (désinvestissement des actifs à haute teneur en carbone et fossile fuels) ? C’est à terme positif pour faciliter d’autres engagements.

EURONEXT (Anthony Attia) : facilite l’accès au marché des PME en croissance, le placement des green bonds de la région ile de France, et sur le marché à terme des matières premières, fait place aux granulés de bois énergie… EURONEXT lance un nouvel indice, le Low carbon 100 (un sorte de « CAC 40 vert », à 100 dont les pure players les plus innovants).

Standard and Poors prend en considération dans ses évaluations, celle des risques et les risques climatiques constituent une préoccupation majeure (monde des assurances, réassurances et produits dérivés, je n’irai pas plus loin). Petit rappel : S&P a dégradé la note de Volkswagen et de plusieurs compagnies énergétiques. Le représentant de la City est plus en retrait tout en reconnaissant que le monde de la finance évolue positivement.

Quelques questions. Une d’elles reste sans réponse : quid du projet de taxe sur les capitaux flottants dont la valeur équivaut à 30 fois celle de l’économie réelle (le PIB de la planète) ? Enfin restons positifs.

3°/ Pour finir  en beauté : la Chine, les Etats-Unis, l’Australie et … Céline Cousteau !

Voici Gill Stein, brillante candidate du Green Party aux élections présidentielles américaines, elle appelle à un Green New Deal, un grand élan vers les renouvelables, vers l’économie circulaire, avec un potentiel, affirme-t-elle, de 20 millions d’emplois. C’est possible en réorientant les dépenses militaires qui n’ont cessé de croitre, en les diminuant de moitié. Et médecin de profession, elle rappelle que lutter contre le dérèglement climatiques, les rejets et émissions, c’est aussi un gain en santé publique (plus de healthcare moins de sickcare !).

Et la Chine, qui comme le dit Gille Stein, a relevé la barre des revendications des émergents ?

 

Le négociateur adjoint chinois, Sun Zhen, est peu disert. Il met clairement en avant la grande réforme de la politique de développement économique engagée au printemps. Un tournant décisif. « On n’est plus dans les concepts, la Chine passe à l’action », pour elle-même, pour mieux répondre aux attentes (criantes) de sa population, convertir ses usines obsolescentes, et elle attend aussi plus d’actions de cette COP 21. Le dialogue doit devenir collaboratif, déboucher sur des coopérations technologiques, sur un accord contraignant pour les pays les plus développés. La Chine va abonder le Climate Fund et, leader des émergents, elle préconise un « Global South bond ».

« We need a shifting vision ».

 

Christine Miller (déléguée de Tasmanie et d’Australie)

-Revoir l’esprit même de l’aide aux pays moins développés.

-Mettre en avant la question dramatique de l’accès aux terres cultivables.

- La Chine: a good shift! But we expect more social justice and human rights.

Last but not least !

Apparition d’américains indiens de l’état de Washington : nous voulons une civilisation écologique.

La pluie battante à ce moment fait résonner la mince toiture de la Galerie. Un bon présage !

Cette pluie ne couvre pas la voie claire de Céline Cousteau : l’Antarctique, les glaciers qui reculent de manière phénoménale, ses exploits (vidéo de la libération d’une énorme baleine prise au filet de braconniers).

We are not apart from Nature, we are a part of Nature !

Donc une semaine assez étourdissante, à la fois rassurante, porteuse d’espoirs concrétisables, insuffisants à apaiser les inquiétudes, mais stimulante et génératrice d’idées, de projets et d’initiatives.

A quelques dizaines de mètres, il faut un autre badge, l’espace des négociations … qui parvient ce samedi au texte tant attendu bien qu’encore flou sur un certain nombre de points et dont les média viennent de parler et parlerons encore longtemps.

Mais le temps de l’action est venu.

Jean-Louis Husson – 12 décembre 2015

 

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